[Carte] Chine : du Yunnan à Beijing en vélo

Après notre article odorant sur le bus, il était temps que nous rétablissions l’équilibre. La Chine n’a pas été qu’une somme de galères. Loin de là. Nous y avons pris du plaisir à pédaler. Le vélo nous a permis de traverser des villages préservés et des paysages vertigineux. Ce mois nous a aussi permis de connaître un peu mieux ce pays en pleine mutation et de constater que la croissance du « miracle chinois » se fait, parfois, au prix d’un sacrifice des milieux naturels.

Notre parcours


Période : juin 2018 // Distance parcourue : 1127 km

Aller en Chine, c’est entrer dans un tout autre monde. Dans les coins reculés du Yunnan, s’attabler dans une cantine et déguster un bao tseu (ces délicieux beignets de riz blancs cuit dans de grandes tours de vapeur) vaudra tantôt au voyageur des regards interrogatifs ou une séance de selfie, tantôt un désintérêt total devant la présence d’occidentaux en ces lieux.

Pour les cyclovoyageurs, l’Empire du milieu est un pays de challenge. La population maîtrise peu l’anglais, et les idéogrammes chinois complexes et indéchiffrables pousseront n’importe quel étranger ne pratiquant pas le mandarin dans ses retranchements. Le Yunnan et le Sichuan, où les sommets des contreforts du Tibet tutoient les 4000 à 5000 mètres d’altitude, mettent aussi les mollets des cyclistes à l’épreuve.

Mais, comme souvent en vélo, la récompense est à la hauteur des efforts fournis. La Chine offre un dépaysement total et des panoramas époustouflants. Des villes et villages anciens bien préservés comme Dali, Shangri-La ou Shaxi, nichés aux milieux de vallées cultivées de rizières et de cultures en étage, aux reliefs vertigineux des gorges du saut du Tigre et du Sichuan, mais aussi des travaux démesurés pour construire ponts et autoroutes à tout va, ce pays fut une des étapes les plus marquantes de notre périple.

  • Jianshui, Yunnan ©yeswecycle
  • Entre Lijiang et Shangri-La, le point culminant de notre périple : 3700 mètres d'altitude. ©yeswecycle
  • Pékin / Beijing est très facile en vélo avec ses nombreuses pistes cyclables ©yeswecycle
  • Les villes poussent comme des champignons ©yeswecycle
  • Dali, Yunnan ©yeswecycle
  • Dali, Yunnan ©yeswecycle
  • Dali, Yunnan ©yeswecycle
  • Dali, Yunnan ©yeswecycle

 

5 bonnes raisons de pédaler en Chine


La nourriture d’abord. Oubliez vos clichés, ici on ne mange ni chien, ni nems ! Mais plutôt des légumes préparés au wok, des plats sains et variés. Nul besoin de pratiquer le chinois pour s’en sortir. Des cantines, que nous avons baptisé « restos frigo », où il suffit de pointer des légumes du doigt dans une grande vitrine réfrigéré, permettent de choisir ses aliments et de se les faire préparer à la minute. On en trouve jusque dans les villages les plus reculés.

Délicieux raviolis à la vapeur, Jianshui ©yeswecycle

Notre premier repas en Chine, un régal ! ©yeswecycle

Le bus étant une expérience épique, le vélo offre l’avantage d’être libre de ses mouvements et d’explorer le pays hors des sentiers battus. L’immensité du territoire oblige cependant à prévoir des trajets en train, une sacrée aventure !

Parce que les routes y sont globalement sûres. Nous n’avons pas eu à nous plaindre de la conduite des automobilistes Chinois, dans leur grande majorité respectueux des cyclistes. Dans le Yunnan et le Sichuan, il est possible de passer des heures entières sans croiser le moindre véhicule. En revanche, l’état des routes est très aléatoire. Certaines portions sont de vrais billards et puis, tout à coup, il faut rouler sur 10 kilomètres de route en travaux, zigzaguer entre les nids de poules, les gros cailloux et se protéger de la poussière. Une contrainte difficile à éviter tant les autorités entreprennent des travaux partout, tout le temps !

Parce que, selon notre expérience, la plupart des habitants que nous avons croisé, malgré une timidité de prime abord et qui peut passer pour de la froideur, se plieront en quatre pour vous aider pour peu qu’on les sollicite. Outre les (nombreuses) séances de selfies, plusieurs habitants se sont arrêtés pour nous donner des gâteaux, des boissons. Certains posent pleins de questions (en chinois!), d’autres nous ont carrément prêté un appart pour nous loger. Un vrai réconfort quand on se retrouve si loin de chez soi.

Nos coups de coeur


  • Shaxi, sur le chemin de la route des chevaux et du thé

Dans cette vallée verdoyante, encore préservée, la vie traditionnelle s’écoule paisiblement. La vallée qui entoure le village est splendide, entourant une montagne couverte de jeunes pins, des champs en terrasse verdoyants et des petits villages à l’architecture traditionnelles préservés. Nous entrons dans Shaxi par un petit pont en pierre enjambant un ruisseau à l’eau translucide. Des ruelles pavés qui filent au milieu du village ancien. Des petites ruelles comme secrètes révèlent sols pavés, façades de bois et de torchis. Des maisons traditionnelles transformées en charmants petits salons de thé et boutiques artisanales…

Shaxi ©yeswecycle

  • Les gorges du Saut du Tigre

A couper le souffle. Tout ici vous fera sentir petit. Le débit de la rivière Jinsha qui dévale dans les gorges à plus de X km/heure. La route qui serpente au milieu de ces 30 kilomètres de route. Si vous le pouvez prenez le temps de poser les vélos et de vous lancer dans une randonnée sur les hauteurs des gorges. Encore un bémol sur les travaux pharaonesques en cours pour développer le tourisme dans la vallée. Une ligne TGV avec un pont surplombant le site est en cours de construction, et le bétonnage va bon train pour accueillir les défilés de bus de touristes.

Le massif du Yulong Xue Shan dans les gorges du Saut du Tigre ©yeswecycle

  • Dormir sur la muraille de Chine

Ce n’est pas vraiment une destination cycliste à proprement parler. Y aller en vélo depuis Pékin n’est d’ailleurs pas franchement agréable. Depuis la gueshouse, le Great wall fresh, une randonnée escarpée serpente sur la muraille. Compter 150 yuans pour bivouaquer sur le mythique monument. L’effort en vaut vraiment la chandelle.

Balade sur la muraille de Chine en dehors des sentiers battus ©yeswecycle

Et si on ne veut plus pédaler ?


A moins d’avoir 6 mois devant soi, prendre le train et le bus est inévitable. Malheureusement, serions-nous tentés de dire, car ce n’est pas toujours de tout repos comme nous vous le racontions ici. Pour vous éviter notre expérience cocasse des transports en commun voici quelques conseils.

  • De Chengdu à Pékin en train

Impossible de voyager avec ses vélos. Il faut les envoyer par un service de fret.

L’achat du billet passager et l’envoi des vélos s’effectuent dans deux lieux différents. Pour le billet de TGV se rendre à la gare de l’Est. Pour les vélos, rendez-vous au service CRE fret à côté de la gare du Nord. Pour l’envoi des vélos, compter 250 yuans pour deux vélos. Penser à bien protéger votre vélo avec des cartons ou des plastiques. Mais impossible de le sécuriser avec un cadenas. Confiance, ils seront a priori bien là à l’arrivée. A Pékin, réception des montures même gare, celle de l’Ouest… ouf !

Voir la carte en début d’article pour l’emplacement des guichets.

  • Pour rejoindre la Mongolie depuis Pékin.

Voici une solution bien moins chère, bien que moins directe, pour rejoindre la Mongolie. Il s’agit de rejoindre la frontière mongole en bus puis de relier Zamin Ud (Mongolie) à Ulaan Baatar (UB) en train.

→ Première étape : le bus Beijing – Erenhot

Compter autour de 620 yuans, vélos compris. Nous avons appris ensuite que le tarif peu être moins élevé en négociant. Le bus couchette est plutôt confortable avec un siège allongé, un oreiller et une grosse couette douillette. Les vélos, eux, n’étaient pas stockés dans les meilleures conditions… Le type qui nous a vendu les billets la veille à commencer à nous demander, un quart d’heure avant le départ, de démonter nos vélos ! Ils ont finalement trouvé une place, non sans haute lutte pour éviter que des pastèques et des caisses remplies de poissons soient stockées dessus !

L’arrêt de bus pour le trajet Beijing – Erenhot, bien malin celui qui peut le repérer ! ©yeswecycle

→ Seconde étape : le passage de la frontière

Une fois à Erhenot, il faut passer la frontière en camionnette. Voilà le passage le plus « what the fuck » que nous ayons vu. Pour parcourir 2 à 3 kilomètres, obligation de passer par les services de chauffeurs de camionnettes. Interdiction de traverser en vélo.

Pour passer la frontière, obligation de monter ses vélos dans une camionnette. Et de partager l’espace avec pneus et valises ! ©yeswecycle

Les chauffeurs attendent le client au terminus du bus et n’hésitent pas à doubler les prix pour les non sinophones. Ne pas hésiter à négocier. Nous avons payé 80 yuans par personne. Cela évoluant vite, mieux vaut demander les tarifs à des voyageurs mongols franchissant aussi la frontière.

→ Troisième étape : Zamin Uud – Ulan-Baator en train

Un train part tous les soirs à 18 heures et arrive le lendemain matin à 8 heures. Compter 13 800 tugrik pour une couchette. Une fois les billets passagers achetés, il suffit d’amener son vélo au bâtiment réservé aux bagages. Là, le vélo est pesé puis la guichetière délivre un reçu (écrit et à remplir en cyrillique, des habitants nous ont aidé). D’une simplicité fort appréciable après la Chine !

Nos conseils


  • Se dépêcher d’aller dans ce pays fascinant avant que routes, ponts et autoroutes n’aient achevé de défigurer le paysage. La Chine base sa croissance sur les grands travaux et les constructions à tout va. Et la protection de l’environnement n’est clairement pas une priorité.
  • Ne pas sous-estimer les difficultés de compréhension que vous allez rencontrer pour vos démarches (achat d’un billet de bus, de train…). A moins de vouloir vous fixer des challenges façon Pékin Express, faitesvous écrire votre demande sur un papier ou faites vous accompagner dès que vous le pouvez par une personne parlant bien anglais et mandarin.
  • Penser à télécharger un VPN avant d’entrer dans le pays, faute de quoi impossible d’accéder à des applications telles que Google, Facebook…
  • Utiliser Google traduction Anglais ↔ Chinois et non pas Français ↔ Chinois, les algorithmes sont plus fins.
  • Apprendre quelques mots de Mandarin, les Chinois seront ravis de vous entendre essayer de parler (une de) leur langue. Par contre, ils commenceront alors à entamer la discussion en Chinois ! Le mot Faguo (prononcer faaagwo) pour « France » ou « wo men shi fagwooo deu » (nous sommes Français) vous apportera tout de suite un énorme capital sympathie !
  • Bien choisir la saison : dès la fin du mois de juin, il pleut beaucoup.

Ah oui et au fait !


– Vous lirez sûrement dans certains guides que ne pas terminer son plat est un signe de politesse. Cela est vrai seulement dans des diners d’affaires importants. Il serait dommage de se priver de finir son assiette !

– Ne refusez pas les cigarettes que l’on vous offrira. C’est un geste de sympathie important. Cela vous arrivera forcément, TOUS les hommes fument. (si vous trouvez un Chinois qui ne fume pas, on paye notre coup !)

– Vous verrez dans les restaurants arriver les bols et assiettes emballés sous plastique. On ne vous donne pas un service neuf à chaque fois. La plonge est en fait externalisée à d’autres entreprises. Ce qui est censé garantir une meilleure propreté.

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